TranscriptaseRevue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites

   
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n°136 - mars/avril 08

 


Edito n°136

 

Gilles Pialoux


 








 

 

La lutte contre le VIH est terre de mémoire. A commencer de ceux qui ne sont plus là pour témoigner. Mémoire aussi de nos errances, de nos combats, du sida " révélateur social" cher à Daniel Defert, et de tout ce qui, dans ces colonnes ou ailleurs, a permis de combattre la stigmatisation et de faire reculer les fantasmes ou l’ignorance. Mais qui dit "mémoire" dit aussi récurrence de la pensée.
C’est-à-dire un retour sur une problématique qui peut avoir été géo­stratégiquement distordue par l’évolution de l’épidémie mais aussi par celle des politiques publiques censées l’endiguer. Pour exemple, le débat (ré)ouvert dans cette dernière livraison de Transcriptases sur les tests de dépistage du VIH qu’ils soient rapides, communautaires ou hospitaliers... Des tests de dépistage qui sont depuis peu à dissocier du "counselling" tout au moins selon les nouvelles recommandations américaines, comme le résume et le discute Stéphane Le Vu (lire dans ce numéro) en écho à un numéro spécial de Clinical Infectious Diseases consacré à cette thématique.

Aux Etats-Unis ou ailleurs, le débat sur la façon d’"augmenter la voilure" en termes de dépistage du VIH se heurte à des questions éthiques, juridiques, et aussi d’organisation des soins.
En clair, comment augmenter l’efficience du dépistage des personnes VIH positives tout en restant dans le droit et en assurant la prévention de celles qui sont VIH-négatives ? Ainsi que, pour les unes et les autres, la confidentialité et le droit à l’information ?
Historiquement - et nous avons été à Transcriptases de ceux qui ont milité dans ce sens - il a été dit, écrit (et organisé) le fait que ce n’est pas le rendu d’un test VIH négatif qui protège mais bien le counselling qui l’accompagne. Et que, d’autre part, il ne saurait y avoir de dépistage du VIH sans consentement éclairé. Il ne s’agit pas là d’un des effets secondaires de l’exceptionnalisme du sida mais bien de justice sociale visant à protéger les personnes atteintes, tout en protégeant de la contamination les personnes séronégatives.

S’il est acquis désormais que le test de dépistage et le counselling peuvent être séparés (ou ce dernier différé) afin de permettre un meilleur déploiement du dépistage dans les services hospitaliers, les lieux communautaires ou aux urgences médico-chirurgicales des hôpitaux (lire l’article d’Anne-Claude Crémieux), la nécessité d’un consentement reste en revanche une dimension indiscutable. Même si se pose le choix de stratégie entre le "opt-out" (consentement implicite) et le "opt-in" (consentement explicite)... C’est là un des enjeux possibles de la lutte contre le sida : l’introduction d’une dose (proportionnelle ?) de pragmatisme, quitte à revenir sur certains dogmes, à l’instar du counselling obligé.