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SWAPS nº 66

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Actualités scientifiques

Dépendance et réaction de sevrage :
pourquoi les benzodiazépines rendent dépendants et les antidépresseurs non

par Yann Le Strat / addictologue, hôpital Louis Mourier (Colombes)

"What is the difference between dependence and withdrawal reactions? A comparison of benzodiazepines and selective serotonin re-uptake inhibitors"
Nielsen M, Holme Hansen E, Gotzsche PC
Addiction, 2012, 107, 900-908

Les antidépresseurs (type inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, ou IRS) n’entraînent pas de dépendance. En revanche, les psychiatres recommandent une diminution progressive des posologies en fin de traitement, afin d’éviter des rebonds symptomatiques. Inversement, les benzodiazépines entraînent un risque de dépendance. Leur diminution progressive est donc nécessaire en fin de traitement, afin d’éviter des rebonds symptomatiques.

Cet apparent paradoxe entre ces deux classes de molécules, l’une largement considérée par la communauté médicale et scientifique comme addictogène (les benzodiazépines), l’autre non (les IRS), mais ayant pourtant des précautions d’emploi similaires en cas de sevrage, est resté largement inexploré jusqu’à une récente revue de la littérature publiée par une équipe danoise. En reprenant les données de nombreux essais cliniques, ainsi que l’évolution des définitions de la dépendance dans les classifications internationales, les auteurs ont mis en évidence la manière dont ces changements ont affecté le paradigme de la dépendance à ces traitements. La révision du DSM en 1980, en rendant nécessaires des symptômes comportementaux (temps passé à consommer, abandon d’activités non liées aux produits, poursuite de consommation en dépit de conséquences négatives entre autres...) et plus seulement des symptômes de dépendance physique (tolérance et sevrage), a entraîné un glissement de des diagnostics.

Les auteurs ont également montré que 37 des 42 symptômes susceptibles de survenir au moment du sevrage de l’une ou l’autre de ces classes pharmacologiques sont communs. Une des limites essentielles de ce dernier aspect de cet élégant travail est l’absence de quantification de ces symptômes, beaucoup plus présents en cas d’arrêt des benzodiazépines qu’au moment de l’arrêt d’un traitement par IRS.