Santé
Réduction des Risques
Usages de Drogues


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SWAPS nº 4

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VIIIe Conférence

Toxicomanie et hépatite C : implication en terme de réduction des riques

par Julien Emmanuelli

Alors que le sida semble en diminution progressive chez les usagers de drogues intraveineuses, du fait notamment d'un accès accru au matériel d'injection stérile conjugué à une modification sensible des comportements à risques, l'infection au VHC paraît néanmoins progresser au sein de cette population : 60 % des usagers de drogues seraient porteurs du virus.

Une progression nuancée par le fait qu'on ne sait pas depuis combien de temps les usagers sont contaminés par le VHC. D'après le professeur Nick Crofts (1), le VHC existait à l'état endémique en Australie avant l'apparition du VIH. Le VHC a même été retrouvé dans des échantillons sérologiques datant de 1971. Une information qui mérite confirmation notamment en raison des risques de faux-positif.

Même si elles contribuent à diminuer les nouveaux cas de contamination par le VHC, les mesures classiques de réduction des risques en direction des usagers de drogues (distribution de seringues et de préservatifs), centrées à l'origine sur le risque VIH, ne peuvent suffire. Cela peut s'expliquer pour différentes raisons.

Pour des mesures de prévention spécifiques

Comparativement au VIH, une moindre quantité de sang suffit à la transmission du VHC (2). Cela signifie, entre autres, que pour ce qui concerne les virus des hépatites, tout élément matériel partagé lors d'une préparation ou d'une injection à plusieurs (seringue, mais aussi eau de dilution de la drogue, filtre, cuillère ou récipient de préparation) peut devenir un vecteur potentiel du VHC au moindre contact d'un de ces éléments mis en commun avec du sang contaminé.

Une information spécifique sur ces modes de contamination va d'ailleurs être mise en place en France (3).

D'autre part, le VHC est un virus relativement résistant au milieu extérieur. Chez certains usagers de drogues, l'origine de la contamination n'a pas encore été mise en évidence. En France, dans environ 20 % des cas d'hépatite C, on ne retrouve pas de pratiques à risques de contamination. Rien n'exclut en l'état actuel des connaissances que le VHC ne se transmette pas, dans certaines conditions chez les usagers de drogues, en dehors d'un contact direct avec du sang contaminé. Ainsi le professeur Nick Crofts a-t-il évoqué la possibilité de transmission lors d'un contact avec la peau par exemple : le virus pourrait ainsi passer du sang sur le pouce utilisé pour comprimer le point d'injection après le shoot, puis du pouce au reste du matériel d'injection, voire au proche environnement matériel (surface sur laquelle s'est effectuée la préparation), puis du reste du matériel ou de son environnement immédiat directement au sang, ou indirectement lors d'un contact d'une surface cutanée porteuse du VHC à une porte d'entrée sanguine. Cette hypothèse, en l'état actuel des connaissances, et notamment en l'absence de système de culture in vitro du VHC, est impossible à confirmer ou à infirmer.

Dans ces cas de figure néanmoins, la probabilité de contamination est certes beaucoup moins importante que lors d'un contact direct de sang à sang, mais la répétition de ces comportements à faibles risques pourrait constituer au fil du temps une voie de transmisssion certaine du VHC.

S'il est donc nécessaire de proposer de nouveaux outils pour enrayer la diffusion de ce virus qu'on connaît encore trop peu, cela ne peut en soi constituer une stratégie suffisante : l'information et la sensibilisation des usagers, ainsi que l'adoption de comportements d'hygiène globale (pas de partage ni de réutilisation du moindre élément participant à l'injection, lavage systématique des mains avant et après chaque injection) sont également prioritaires.


(1) Session intitulée : Hépatite virale-Hépatite toxique : virologie, épidémiologie, réduction des risques et traitements.

(2) L'État s'apprête à intégrer des récipients et des filtres à usage unique dans les trousses de prévention diffusées par les associations, de manière expérimentale dans un premier temps. Il faut savoir cependant que la plupart de ces éléments sont déjà distribués, en lot ou à l'unité, par certaines associations de lutte contre le sida.

(3) Pour citer un ordre de grandeur, on évalue le risque statistique de tranmission lors d'une piqure accidentelle d'un soignant à environ 0,3% pour le VIH, 3 à 10 % pour le virus de l'hépatite C et 30 à 60 % pour le virus de l'hépatite B.